vendredi 9 mars 2012

DÉBAT : Faut-il être sordide, glauque et gore pour faire un thriller à succès ?







Faut-il être sordide, glauque et gore pour faire un thriller à succès ?


Mais non allez vous me répondre et pourtant : Le chuchoteur de Donato Carissi, 300 000 ex vendus en France avec comme pitch :
Cinq petites filles ont disparu. Cinq petites fosses ont été creusées dans la clairière. Au fond de chacune, un petit bras, le gauche."

Je l'ai lu pour essayer de comprendre ce succès. Je n'ai pas pu aller jusqu'au bout, révulsé par cette abomination d'enfants torturés et tués.


Les visages de Jesse Kellerman revient lui aussi sur une histoire de meurtres d'enfants dont on retrouve les visages dans des tableaux...Comment peut-on avoir envie de lire cela ? Pour moi c'est un mystère (pas une critique) mais pas pour 500 000 autres lecteurs français.


Jean-Christophe Grangé s'est fait une spécialité des descriptions de scènes de meurtres "écoeurantes" et vend des millions de livres.

Michael Connelly dans Le Poète (considéré comme son chef d'oeuvre) nous raconte une partie de l'histoire du point de vue d'un pédophile meurtrier. Mais quel plaisir peut-on prendre à lire cela ?


Et Maxime Chattam ? Oui c'est à certains moments une boucherie bien sadique mais il me semble que Maxime Chattam mène une quête que je trouve intéressante. A travers chacun de ses ouvrages, il cherche à définir "le mal". C'est presque un travail de polissage donc.

Nicolas Sker.

**********
Donnez vos opinions, impressions en commentaires, on les installera sur ce billet, et Nicolas viendra répondre, argumenter, bref débattre quoi ! :))
Et j'annonce la couleur : je serai la preum's à "attaquer"... et comme on n'est jamais mieux servi que par soi-même, j'installe de suite mon intervention !

Dup :

Ben oui, je veux être la preum's, car quelque part je me sens un peu visée...
A part Kellerman que je n'ai pas ( encore ) lu, les autres font presque tous partis de mes coups de coeur, chroniqués ou pas.  
Le chuchoteur et Le poête, c'est sûr. 
Grangé, j'aime moins maintenant, avant, oui beaucoup. 
Quant à Chattam, attention, on touche pas à mon chou-chou !
Et vous avez oublié de citer Franck Thilliez ;)


Bon, alors énervée et bavante, je réponds :))
Non, je ne pense pas que ce soit le côté glauque ou gore qui fait le succès d'un thriller. Qui dit thriller, dit meurtres, forcément il en faut bien ! C'est plus le côté scotchant du livre, le côté "inlâchable" comme je dis souvent. Et ce côté scotchant peu aussi bien être apporté par l'intrigue, l'enquête, la quête, que oui, le crime bien gore. Je reconnais que cela ne me dérange pas, sans pour cela courir après. Encore que, c'est cela qui m'a fait acheter tous les Chattam... A sa décharge, on pourra dire qu'il ne "touche" pas aux enfants.
Pour moi, on peut faire un thriller brillant sans ce côté macabre, ce n'est pas une obligation. 


Lejardindenatiora :


Alors je n'ai encore lu aucun de ces livres, mais sur mon étagère m'attendent sagement : Le chuchoteur / Les visages / deux livres de Chattam. Hum hum...
J'aime beaucoup les romans gore et sordides, mais pas que. Les Thilliez par exemple sont d'excellents thrillers à succès qui jouent beaucoup sur l'atmosphère pour créer le suspense. Moi ce que j'attends c'est d'avoir envie de tourner les pages encore, qu'il y ait du sang ou pas. Je préfère d'ailleurs une ambiance sordide au gore.
Au passage, j'ai lu hier "Etre une femme" et c'est génial sans être gore ;)


Alexielle63 :


Je suis d'accord avec Dup : pour moi, ce que j'aime dans un thriller c'est le suspense, la tension créés par l'auteur et qui tient la route (en clair, que le tout ne retombe pas au bout de quelques lignes). Après, oui, forcément, il y a des meurtres c'est le principe et c'est vrai que certaines scènes peuvent être choquantes mais là non plus, ça ne me dérange pas plus que ça. Il n'y a qu'une seule fois où j'ai eu du mal et où l'auteur m'a franchement écoeuré : c'était dans l'Enfant des cimetières de Sire Cédric car dans ce livre, j'ai vraiment eu l'impression que l'auteur en faisait beaucoup dans le sanguinolant et dans le sordide. Tellement que ça ne tenait pas la route et même ça m'a semblé franchement ridicule car le livre ne tenait que sur ça... Alors en clair : du gore, du sordide, du sang et de la chair fraîche (lol) ok mais à condition qu'il n'y ait pas que ça... Il faut une intrigue qui tienne en haleine, un mystère à percer et qu'arrivé à la fin, on sorte un peu ko et qu'on pousse un "Waouw, il m'a bien eu, là !". C'est ce que j'ai pu trouver dans les Maxime Chattam, J.C. Grangé et Franck Thilliez que j'ai lu mais aussi dans les Michaël Connelly (enfin, ceux où il n'y a pas Harry Bosch car je déteste ce personnage !!!).



Dup :


Merci Alexielle63 ! En revanche, je ne suis pas d'accord avec ce que tu dis sur Sire Cédric. Lui aussi fait des "inlâchables", tellement puissant que gore ou pas gore, j'adhère complètement. En revanche avec cet auteur, ce n'est pas comme les "vrais" thrillers, genre Chattam, Thilliez, and co. Il faut accepter le côté un brin fantastique. Mais je trouve que c'est tellement bien amené, pile poil au milieu d'une enquête classique, que ça passe tout seul.

Donc, pas touche à Chattam, Thilliez ET Sire Cédric :))
Et à mon avis la liste va s'allonger !!!




Lune :


Alors personnellement j'aime les thrillers glauques et gores quand le scénario est très élaboré, du style du Chuchoteur par exemple, qui est tout de même énorme.

Je garde bien à l'esprit pendant ma lecture que tout ça est imaginaire et participe de l'intrigue. Il faut juste savoir faire la part des choses.

De plus je pense que bien plus de personnes que l'on croit sont "voyeuses" et attirées par le trash, après il y a celles qui assument et les autres. J'assume !




Phooka :


Alors moi je vous le dis c'est pas mon truc. Enfin je dis ça mais je n'en ai jamais lu, justement j'ai pas envie. Je trouve ça trop glauque et ça ne me convient pas. Et pourtant j'aime les romans d'horreur, les Stephen King ou Clive Barker, mais là c'est différent parce que c'est du fantastique. Idem pour Sire Cédric, oui c'est du thriller mais fantastique donc j'adore. Un peu comme "Le livre sans nom".
Mais si c'est trop réaliste alors non, j'ose même pas ouvrir le bouquin!

Et pour en revenir à la question, je ne pense pas qu'il faille que ce soit glauque pour avoir un thriller à succès, mais il faut reconnaître que la "glauquitude" marche plutôt bien de nos jours!




Alex Mot-à-Mots :


Il me semble que les auteurs français sont plus dans la nuance. Pascal Garnier savait créer des atmosphères - Pierre Lemaître est plus fin psychologue - Frank Thilliez est un spécialiste des ambiances - sans oublier les auteurs régionaux de polars parfois excellents.

Moi je rejoins Nicolas Sker et Phooka ... je suis sans doute une petite nature ou une âme sensible - appelez cela comme vous voudrez - mais je trouve que le glauque/gore/sordide n'est pas forcément nécessaire pour un bon thriller voire livre en général. Au contraire même, je fuis tout ce qui est trop macabre et sanglant ...

Par exemple les ouvrages de Steve Berry, généralement il n'y a pas grand chose de dur ou gore, quelques paragraphes sur des centaines de pages au maximum. Et pourtant le suspens est là, l'angoisse monte progressivement ... bref on passe un sacré bon moment de lecture ^^ Autre exemple, La tour noire de Bayard que je ne peux que recommander ... pourtant il y a des meurtres et des trucs pas joli-joli, mais cela reste "raisonnable".

Tout est question de dosage et tout dépend de la sensibilité du lecteur ... Personnellement je peux "supporter" un peu de gore si l'intrigue en vaut la peine, par contre si j'ai clairement l'impression que l'auteur se fait un petit "kiff" avec du sang de partout et des membres qui se promènent loin de leur propriétaire - sans que cela apporte grand chose au roman - j'ai plutôt envie d'arrêter ma lecture ! Quand il y en a trop cela devient même ridicule !

Mais après comme l'a dit Phooka, ça marche bien (pas forcément que dans le domaine livresque d'ailleurs) ... donc pourquoi s'en priver ?



Wal :


Je suis grande fan de ce type de littérature !

Tout dernièrement, j'ai lu "GENESIS" de Karin SLAUGHTER, dont les descriptions de tortures font froid dans le dos (Critique sympa sur mon blog ;) )
Egalement comme DUP, je citerai Franck THILLIEZ qui livre des bouquins très fouillés et d'une horrible réalité... SIRE CEDRIC aussi, dont la lecture de "De fièvre et de sang" accompagnée de messages de DUP m'a littéralement fait flipper !!!!
Il y a aussi Gilles CAILLOT et tant d'autres qu'on ne peut pas toutes et tous les citer !!!!!

Si ! J'ajouterais Ingrid DESJOURS, parce que l'histoire et les faits qui jalonnent la vie de l'assassin dans "Echo" sont ignobles et dérangeants....

Le glauque, le gore, nous sommes des millions à aimer cela !
Parce que tant que c'est de la fiction, il est bon de se faire peur ! Et comme le dit Lune, on a tous un petit côté voyeur... (C'est dans la nature humaine de regarder sur le bas côté de la route pour regarder la voiture accidentée et ses passagers amochés ! )
Nous sommes curieux et le glauque/gore/saignant/avec-une-sauce-au-poivre-svp-merci nous jette sans préavis dans les entrailles des victimes et/ou les pensées des tueurs. On a besoin de "fantasmer" (mais pas au sens "sexe" hein ?) sur l'être humain et ses capacités à faire le mal, à résister, à survivre, etc...
Repensez à la mythologie, de quelque origine qu'elle soit: ce n'est pas "joli" non plus !
Souvenez vous de Prométhée, enchainé sur une montagne et à qui un aigle revient dévorer le foie chaque jour !
Osiris qui se fait couper en rondelles par son frère...
Dans d'autres régions (je ne me souviens où...) une jeune fille se fait couper les doigts qui deviendront des animaux marins, ailleurs encore une jeune fille se jettera dans le métal en fusion qui va servir à créer une cloche......
Ces histoires sont antiques ! Et pourtant, elles ont toujours autant de succès.
Elles font partie intégrante d'une sorte de grand inconscient collectif. Elles ont servies de tout temps à véhiculer savoir, culture, morale...

Les thrillers n'ont finalement rien de bien nouveau, à part qu'ils nous tiennent en haleine plus longtemps, pour notre plus grand plaisir (à nous, amateurs du genre !)

Nicolas :

Intéressante cette analogie avec le mythe. Pour autant, je ne crois pas que cela soit comparable. Le mythe ne s'apesantit pas sur des détails cliniques et les scènes sanglantes ou violentes sont toujours au service d'un récit expliquant une origine, traduisant une pensée collective comme Wal l'explique fort bien.
Les romans auxquels je fais allusion mettent au coeur de leur récit le sadisme, la cruauté détaillée comme si c'était là le fond et l'originalité de l'histoire. Et j'insiste sur le marketing : ces livres se vendent sur une présentation sordide qui met en avant l'inventivité sadique du tueur. Quand on parle de Prométhée, on se souvient surtout de l'idée que les Dieux ont peut-être donné à l'Homme un pouvoir trop puissant pour lui...la science sans conscience.
Je ne vois rien de tout cela dans Le Chuchoteur qui nous décrit seulement des souffrances d'enfants absolument insoutenables. Pour qu'on se dise quoi ? Le tueur est horrible, il faut le retrouver ? Ah c'est moche, heureusement que cela ne m'arrive pas à moi ? Tiens je n'aurais pas pensé que l'on puisse être aussi sadique, c'est intéressant ? Comment lire un truc qui nous explique comment un enfant a été torturé, noyé, violé et j'en passe. Parce que cela arrive dans la réalité ? So what ? Ce n'est pas assez horrible comme ça dans la vraie vie, il faut aussi le retrouver dans la littérature ?
Cela rejoint l'idée de l'accident sur le bord de la route évoquée par Wal. Personnellement, c'est quelque chose que je trouve odieux et je ne regarde jamais les accidents. Quel plaisir à se nourrir d'une douleur ou d'une souffrance ? Qu'est-ce cela apporte ? (D'ailleurs ça me donne l'idée d'une nouvelle que j'écrirai peut-être ce mois-ci si j'ai le temps). Bref, ça me rappelle les exécutions publiques pratiquées jadis auxquelles on venait assister comme au spectacle. C'est de la littérature allez-vous me répondre. Ne confondons pas tout. Oui mais quand même ça répond à un besoin que j'ai du mal à comprendre.
Peut-être que l'on devrait creuser du côté de l'instinct humain : un truc en rapport avec le corps, la chair. Je crois que c'est par là qu'il faut chercher. Peut-être qu'en fait, ce que vous aimez, c'est voir quelque chose de rare, ordinairement caché et qui vous est soudain dévoilé. Oui c'est peut-être ça. Un sentiment d'être témoin d'un truc qui sort du quotidien. C'est ça ?



Phooka

J'aime beaucoup ta réponse Nicolas. Moi non plus je ne regarde pas quand il y a un accident sur la route, au contraire je détourne le regard. Je ne supporte pas la souffrance d'autrui. Et de la même façon je ne peux pas lire ces thrillers ou alors je sauterais les passages de la même façon que je détourne le regard d'un accident. Je ne me vante pas de ne pas être voyeur, mais juste que je ne supporte pas ce type de violence alors que ça ne me gène pas, bien au contraire lorsqu'il s'agit de fantastique (Clive Barker ou Sir Cédric) parce que justement ce n'est pas réel.

Maintenant pourquoi ça plait..ben on n'est pas tous pareil. C'est comme les jeux viéos où il faut dézinguer tout le monde je suppose.

Mais je reste persuadée qu'on peut faire un succès en thriller sans ce côté hyper violent et glauque.


Dup

Là, je rejoins Phooka sur sa conclusion !

Je suis pareil vis-à-vis d'un accident ( donc le voyeurisme en quelque sorte ), dans la vraie vie.

En revanche quand je plonge dans un livre, une histoire, qu'elle soit teintée fantastique ou pas, je suis dans un autre monde et franchement, quelque soit les horreurs amenées cela ne me dérange pas! Attention, il faut que celles-ci arrivent logiquement et/où servent l'intrigue hein !


Ptitetrolle

Très intéressant ce débat! Je ne suis pas une pro des thrillers, même si j'ai lu quasiment tous les auteurs de "gore/sadique/sanglant" cités plus hauts, entre autres Maxime Chattam, Franck Thilliez, Le Chuchoteur ou Sire Cédric.
Comme les autres, je pense que ce n'est pas le gore qui fait un bon thriller. L'intrigue, le suspens, garder le lecteur en haleine, le surprendre, c'est ça qui fait une bonne histoire. Du gore pour du gore, ça ne vaut rien.
Mais en même temps, entre un bon thriller (avec super intrigue, suspens et tout le tintouin) qui reste gentillet et un autre bon thriller avec un peu d'hémoglobine, ben moi je vote pour le gore.
C'est juste que ça rajoute de l'émotion, du "spectacle". Quand je lis un passage gore, je ne suis pas dégoutée (ou rarement) parce que je sais que ce n'est qu'une fiction, et j'ai plutôt un coup d'adrénaline, ça rend le suspens encore plus intense.
Et bizarrement, dans la vraie vite je suis une vraie chochotte là dessus ! Je déteste le sang et rien que d'en parler j'ai limite envie de m'évanouir. Voir sous mes yeux une scène de violence réelle me mets hyper mal à l'aise, et si je voyais un accident de la route (je touche du bois, ça ne m'est encore jamais arrivé), c'est clair que je détournerai les yeux sous peine de me sentir très mal...
Du coup je me demande si mon "amour" du gore dans les thriller n'est pas lié à ça : dans la vraie vie, je ne peux pas me permettre de voir une goutte de sang sans tomber dans les pommes, et j'éprouve une énorme incompréhension face aux violences gratuites.
Alors peut-être qu'un peu à la façon de Maxime Chattam, je recherche dans le thriller "gore" à comprendre ce qu'est "le Mal", cette part sombre de l'homme qui reste un grand mystère !

Nicolas :


Merci à tous de votre honnêteté dans vos réponses. C’est un vrai plaisir de lecture et cela enrichit vraiment la compréhension de ce phénomène. En gros, à part Wal qui m’a l’air le plus amateur de ce genre de littérature en soit, tous les autres privilégient d’abord le scénario et s’il y a de l’horreur dedans, on est pas contre se faire un petit frisson. Mais je vais alors aller plus loin. Et je pense qu’il faut faire la distinction entre le gore et le glauque. A la limite le gore est souvent si radical qu’on arrive à se dire que c’est de la fiction. Mais le glauque est plus vicieux. Par exemple tout ce qui touche aux tueurs d’enfants, je ne peux vraiment pas. C’est juste insupportable de lire ça. Et vraiment là, je ne comprends pas. Est –ce qu’un pitch qui raconte que l’on retrouve des bras de petites filles enterrés dans un bois (c’est le seul pitch du Chuchoteur) vous donne envie d’acheter le livre ?


Wal :


Houla ! on se fait une fausse idée de moi !!!!! je me suis sûrement mal exprimée !!!!
Je suis hyper fan de ce genre de littérature mais ce n'est pas pour cela que je regarde les cartons au bord des routes, j'ai vu assez d'horreurs dans mon ancien job...
Je ne fais qu'un constat "général", une très grande majorité regardera ce qu'elle a sous les yeux !

La violence au quotidien, la mort, sont tellement banalisées par les médias que cela finit peut-être par nous décaler de la réalité ?
Il n'y a qu'à regarder les infos ou ouvrir le journal pour que toutes les horreurs du monde vous sautent à la gorge !
Alors est-ce parce que nous sommes trop ou passez impressionnables que nous recherchons des sensations fortes dans les détails de ces livres glauques ?
Est-ce que cela nous "sert" à extérioser" des angoisses inconscientes ?

J'aime lire ces livres, cela me met souvent mal à l'aise mais c'est comme ça, je suis bon public pour le gore pourvu que l'enquête soit bien menée et le suspens au rdv ! `Car juste du gore "gratuit", sans histoire/genèse/recherche autour, non !
J'aime comprendre pourquoi un serial killer devient serial killer... Et le détail de ce qu'ils sont capables de faire subir fait partie "du tableau clinique" de l'individu... je trouve le tout fascinant...
Les êtres humains sont si surprenants !

Je pense également qu'il n'y a pas forcément besoin d'hémoglobine et de tortures sanguinolentes pour faire un très bon thriller... On peut aussi faire frémir en laissant sous entendre les faits... (Je repense au livre de Jean-Marc Souvira, LE MAGICIEN)
Et cela peut être tout aussi insoutenable que si c'était détaillé...

Les auteurs écrivent (gore ou non) pour passer un message, une idée, une impression, une peur, une conviction, un avertissement, de la poésie, du rêve, du divertissement...
Ce n'est pas aussi évident que dans les mythes et légendes, j'en conviens mais je suis persuadée que tout à un sens quelque soit la littérature choisie !




Dup :


En fait je me retrouve dans ce que dit Wal, car j'aime stresser, j'aime avoir peur, et c'est pour ça que j'aime les thrillers. Et je crois qu'en matière de thrillers nous avons les mêmes goûts toutes les deux.
Contrairement à Niki, les Agatha Cristhie, les Sherlock Holmes par exemple, ne me passionnent pas du tout...il faut que ça bouge :))
Bon, heureusement, il en faut pour tous les goûts !!!

Et je vais reprendre l'exemple de Wal car je pense qu'il va étayer ma thèse.
Le magicien de Jean-Marc Souvira ( je ne connais pas les chiffres de vente, mais il me semble qu'il a fait un carton ) ne contient aucune scène gore, glauque. C'est juste sous-entendu, et c'est bien assez car là encore il s'agit d'enfants : c'est un pédophile qui est traqué. C'est un livre que j'ai néanmoins beaucoup aimé. Alors suis-je insensible, perverse ?
Je ne crois pas, je suis mère donc quelque part, logiquement plus sensible à tout ce qui touche aux gamins. Et bien dans un livre comme celui ci, je fais corps et âme avec le commissaire qui traque l'affreux pas beau du tout ! Et quand en plus le personnage du flic créé par l'auteur est un personnage avec qui on entre facilement en empathie, ben c'est gagné !

Et ça fait un thriller ni sordide, ni gore, ni glauque et qui a eu du succès !


Nicolas :


Personnellement, cela m’est très pénible de lire ce type d’ouvrage. Mais je pense que la limite qui me fait refermer le bouquin, ce ne sont pas les détails, les descriptions, c’est lorsque l’auteur décide de raconter l’histoire (ou une partie de l’histoire) du point de vue du pédophile. Comme dans Le Poète. C’est insoutenable de se retrouver dans la tête, dans les projets et les vices d’une telle personne. D’autant que le lecteur (en tout cas moi) a toujours ce réflexe étrange de vouloir que les personnages réussissent à atteindre leurs objectifs. Je trouve cela impossible de lire un bouquin en se disant « pourvu que ce salaud n’arrive pas à ses fins ». C’est comme si on me demandait de lire à reculons. On a toujours un peu envie que le méchant arrive à quelque chose, ne serait-ce que pour mieux mettre à l’épreuve notre héros et le voir se surpasser. C’est pour cela que je ne peux pas lire ces ouvrages, parce que mon être entier est confronté à une contradiction indépassable. Surtout s’il s’agit d’enfants maltraités ou victimes de sadiques. Ca va faire un peu Caliméro, mais c’est réellement trop injuste pour que j’ai envie que l’on me raconte une histoire là-dessus.

Dup:


Je viens de relire ma chronique sur Le chuchoteur... justement j'avais dit ceci :" On avance de surprises en surprises, plus ou moins macabres. Mais jamais cela n'a dérapé dans le gore, le sensationnel "
Ce que je veux dire c'est qu'il n'y a pas de scènes gores. Il y a eu meurtres, on retrouve des bras, point. C'est juste  flippant.


SBM :


Merci pour cet échange très intéressant. Perso, je trouve que les auteurs français de polars donnent dans la surenchère gore, je n'aime pas (il y a aussi Karyl Ferey, très violent). Le pitch du roman de Carrisi me fait retarder cette lecture, même si on me dit que c'est très bien, les enfants torturés, très peu pour moi. Par contre, il n'y a pas de descriptions morbides ou violentes dans "Les visages", un grand livre sur l'Amérique.


Licorne :


Après ce débat passionnant, je vais sûrement répéter certaines idées, mais pour moi également il n'est absolument pas besoin d'hémoglobine à profusion pour faire un bon thriller, c'est l'atmosphère qui dégage tout et l'écriture stylée qui permet de faire monter le suspens, les détails sanguinolents ou glauques sont bien souvent des artifices qui nous permettent de visualiser et d'accentuer la terreur d'une action. Cela nous met plus vite en situation. J'ai été très mal à l'aise avec les livres de Mo Hayder "pig island" par exemple... et certains brusssolo ou chattam. Mais la plupart du temps comme on est transporté par le bon sujet de l'intrigue, il n'est pas monstrueux d'adhérer à quelques "glauquosités". Pour résumer, ce n'est pas ma tasse de thé, (et de moins en moins en vieillissant), mais si l'histoire le suggére, pourquoi pas ?


Nicolas :

Je viens de m’amuser à regarder un peu les pitch des romans policiers/thrillers en vente en ce moment. Je vous promets que c’est vrai : dans un pitch sur deux, on a le droit à la phrase « une série de cadavres atrocement mutilés ». L’inventivité ou la quantité de mutilation sur les victimes est un argument de vente. C’est cela qui me fait le plus peur. Les éditeurs considèrent (et certainement à juste titre sinon ils ne le feraient pas) qu’ils vendront plus de livres s’ils mettent en avant « des corps atrocement mutilés ».

Ma question à tous est la suivante : à qualité scénaristique égale, achetez-vous le livre qui dit « une série des cadavres atrocement mutilés » ou seulement « une série de victimes ». Si vous répondez tous honnêtement (et jusque-là, tout le monde a été d’une honnêteté réellement passionnante), ça va être intéressant.

Et pour ma prochaine intervention, je vais essayer de donner une perspective un peu plus psychologico-historico à cette question du goût pour le sordide et les mutilations en tout genre. Je suis sûr qu’il y a un truc à creuser du côté de l’évolution humaine.












19 commentaires:

Anonyme a dit…

Alors je n'ai encore lu aucun de ces livres, mais sur mon étagère m'attendent sagement : Le chuchoteur / Les visages / deux livres de Chattam. Hum hum...
J'aime beaucoup les romans gore et sordides, mais pas que. Les Thilliez par exemple sont d'excellents thrillers à succès qui jouent beaucoup sur l'atmosphère pour créer le suspense. Moi ce que j'attends c'est d'avoir envie de tourner les pages encore, qu'il y ait du sang ou pas. Je préfère d'ailleurs une ambiance sordide au gore.
Au passage, j'ai lu hier "Etre une femme" et c'est génial sans être gore ;)

Alexielle63 a dit…

Je suis d'accord avec Dup : pour moi, ce que j'aime dans un thriller c'est le suspense, la tension créés par l'auteur et qui tient la route (en clair, que le tout ne retombe pas au bout de quelques lignes). Après, oui, forcément, il y a des meurtres c'est le principe et c'est vrai que certaines scènes peuvent être choquantes mais là non plus, ça ne me dérange pas plus que ça. Il n'y a qu'une seule fois où j'ai eu du mal et où l'auteur m'a franchement écoeuré : c'était dans l'Enfant des cimetières de Sire Cédric car dans ce livre, j'ai vraiment eu l'impression que l'auteur en faisait beaucoup dans le sanguinolant et dans le sordide. Tellement que ça ne tenait pas la route et même ça m'a semblé franchement ridicule car le livre ne tenait que sur ça... Alors en clair : du gore, du sordide, du sang et de la chair fraîche (lol) ok mais à condition qu'il n'y ait pas que ça... Il faut une intrigue qui tienne en haleine, un mystère à percer et qu'arrivé à la fin, on sorte un peu ko et qu'on pousse un "Waouw, il m'a bien eu, là !". C'est ce que j'ai pu trouver dans les Maxime Chattam, J.C. Grangé et Franck Thilliez que j'ai lu mais aussi dans les Michaël Connelly (enfin, ceux où il n'y a pas Harry Bosch car je déteste ce personnage !!!).

Dup a dit…

Merci Alexielle63 ! En revanche, je ne suis pas d'accord avec ce que tu dis sur Sire Cédric. Lui aussi fait des "inlâchables", tellement puissant que gore ou pas gore, j'adhère complètement. En revanche avec cet auteur, ce n'est pas comme les "vrais" thrillers, genre Chattam, Thilliez, and co. Il faut accepter le côté un brin fantastique. Mais je trouve que c'est tellement bien amené, pile poil au milieu d'une enquête classique, que ça passe tout seul.

Donc, pas touche à Chattam, Thilliez ET Sire Cédric :))
Et à mon avis la liste va s'allonger !!!

Lune a dit…

Alors personnellement j'aime les thrillers glauques et gores quand le scénario est très élaboré, du style du Chuchoteur par exemple, qui est tout de même énorme.

Je garde bien à l'esprit pendant ma lecture que tout ça est imaginaire et participe de l'intrigue. Il faut juste savoir faire la part des choses.

De plus je pense que bien plus de personnes que l'on croit sont "voyeuses" et attirées par le trash, après il y a celles qui assument et les autres. J'assume !

Phooka a dit…

Alors moi je vous le dis c'est pas mon truc. Enfin je dis ça mais je n'en ai jamais lu, justement j'ai pas envie. Je trouve ça trop glauque et ça ne me convient pas. Et pourtant j'aime les romans d'horreur, les Stephen King ou Clive Barker, mais là c'est différent parce que c'est du fantastique. Idem pour Sire Cédric, oui c'est du thriller mais fantastique donc j'adore. Un peu comme "Le livre sans nom".
Mais si c'est trop réaliste alors non, j'ose même pas ouvrir le bouquin!

Et pour en revenir à la question, je ne pense pas qu'il faille que ce soit glauque pour avoir un thriller à succès, mais il faut reconnaître que la "glauquitude" marche plutôt bien de nos jours!

Alex Mot-à-Mots a dit…

Il me semble que les auteurs français sont plus dans la nuance. Pascal Garnier savait créer des atmosphères - Pierre Lemaître est plus fin psychologue - Frank Thilliez est un spécialiste des ambiances - sans oublier les auteurs régionaux de polars parfois excellents.

Lady K a dit…

Moi je rejoins Nicolas Sker et Phooka ... je suis sans doute une petite nature ou une âme sensible - appelez cela comme vous voudrez - mais je trouve que le glauque/gore/sordide n'est pas forcément nécessaire pour un bon thriller voire livre en général. Au contraire même, je fuis tout ce qui est trop macabre et sanglant ...

Par exemple les ouvrages de Steve Berry, généralement il n'y a pas grand chose de dur ou gore, quelques paragraphes sur des centaines de pages au maximum. Et pourtant le suspens est là, l'angoisse monte progressivement ... bref on passe un sacré bon moment de lecture ^^ Autre exemple, La tour noire de Bayard que je ne peux que recommander ... pourtant il y a des meurtres et des trucs pas joli-joli, mais cela reste "raisonnable".

Tout est question de dosage et tout dépend de la sensibilité du lecteur ... Personnellement je peux "supporter" un peu de gore si l'intrigue en vaut la peine, par contre si j'ai clairement l'impression que l'auteur se fait un petit "kiff" avec du sang de partout et des membres qui se promènent loin de leur propriétaire - sans que cela apporte grand chose au roman - j'ai plutôt envie d'arrêter ma lecture ! Quand il y en a trop cela devient même ridicule !

Mais après comme l'a dit Phooka, ça marche bien (pas forcément que dans le domaine livresque d'ailleurs) ... donc pourquoi s'en priver ?

Anonyme a dit…

Je suis grande fan de ce type de littérature !

Tout dernièrement, j'ai lu "GENESIS" de Karin SLAUGHTER, dont les descriptions de tortures font froid dans le dos (Critique sympa sur mon blog ;) )
Egalement comme DUP, je citerai Franck THILLIEZ qui livre des bouquins très fouillés et d'une horrible réalité... SIRE CEDRIC aussi, dont la lecture de "De fièvre et de sang" accompagnée de messages de DUP m'a littéralement fait flipper !!!!
Il y a aussi Gilles CAILLOT et tant d'autres qu'on ne peut pas toutes et tous les citer !!!!!

Si ! J'ajouterais Ingrid DESJOURS, parce que l'histoire et les faits qui jalonnent la vie de l'assassin dans "Echo" sont ignobles et dérangeants....

Le glauque, le gore, nous sommes des millions à aimer cela !
Parce que tant que c'est de la fiction, il est bon de se faire peur ! Et comme le dit Lune, on a tous un petit côté voyeur... (C'est dans la nature humaine de regarder sur le bas côté de la route pour regarder la voiture accidentée et ses passagers amochés ! )
Nous sommes curieux et le glauque/gore/saignant/avec-une-sauce-au-poivre-svp-merci nous jette sans préavis dans les entrailles des victimes et/ou les pensées des tueurs. On a besoin de "fantasmer" (mais pas au sens "sexe" hein ?) sur l'être humain et ses capacités à faire le mal, à résister, à survivre, etc...
Repensez à la mythologie, de quelque origine qu'elle soit: ce n'est pas "joli" non plus !
Souvenez vous de Prométhée, enchainé sur une montagne et à qui un aigle revient dévorer le foie chaque jour !
Osiris qui se fait couper en rondelles par son frère...
Dans d'autres régions (je ne me souviens où...) une jeune fille se fait couper les doigts qui deviendront des animaux marins, ailleurs encore une jeune fille se jettera dans le métal en fusion qui va servir à créer une cloche......
Ces histoires sont antiques ! Et pourtant, elles ont toujours autant de succès.
Elles font partie intégrante d'une sorte de grand inconscient collectif. Elles ont servies de tout temps à véhiculer savoir, culture, morale...

Les thrillers n'ont finalement rien de bien nouveau, à part qu'ils nous tiennent en haleine plus longtemps, pour notre plus grand plaisir (à nous, amateurs du genre !)

Sker a dit…

Intéressante cette analogie avec le mythe. Pour autant, je ne crois pas que cela soit comparable. Le mythe ne s'apesantit pas sur des détails cliniques et les scènes sanglantes ou violentes sont toujours au service d'un récit expliquant une origine, traduisant une pensée collective comme Wal l'explique fort bien.
Les romans auxquels je fais allusion mettent au coeur de leur récit le sadisme, la cruauté détaillée comme si c'était là le fond et l'originalité de l'histoire. Et j'insiste sur le marketing : ces livres se vendent sur une présentation sordide qui met en avant l'inventivité sadique du tueur. Quand on parle de Prométhée, on se souvient surtout de l'idée que les Dieux ont peut-être donné à l'Homme un pouvoir trop puissant pour lui...la science sans conscience.
Je ne vois rien de tout cela dans Le Chuchoteur qui nous décrit seulement des souffrances d'enfants absolument insoutenbles. Pour qu'on se dise quoi ? Le tueur est horrible, il faut le retrouver ? Ah c'est moche, heureusement que cela ne m'arrive pas à moi ? Tiens je n'aurais pas pensé que l'on puisse être aussi sadique, c'est intéressant ? Comment lire un truc qui nous explique comment un enfant a été torturé, noyé, violé et j'en passe. Parce que cela arrive dans la réalité ? So what ? Ce n'est pas assez horrible comme ça dans la vraie vie, il faut aussi le retrouver dans la littérature ?
Cela rejoint l'idée de l'accident sur le bord de la route évoquée par Wal. Personnellement, c'est quelque chose que je trouve odieux et je ne regarde jamais les accidents. Quel plaisir à se nourrir d'une douleur ou d'une souffrance ? Qu'est-ce cela apporte ? (D'ailleurs ça me donne l'idée d'une nouvelle que j'écrirai peut-être ce mois-ci si j'ai le temps). Bref, ça me rappelle les exécutions publiques pratiquées jadis auxquelles on venait assister comme au spectacle. C'est de la littérature allez-vous me répondre. Ne confondons pas tout. Oui mais quand même ça répond à un besoin que j'ai du mal à comprendre.
Peut-être que l'on devrait creuser du côté de l'instinct humain : un truc en rapport avec le corps, la chair. Je crois que c'est par là qu'il faut chercher. Peut-être qu'en fait, ce que vous aimez, c'est voir quelque chose de rare, ordinairement caché et qui vous est soudain dévoilé. Oui c'est peut-être ça. Un sentiment d'être témoin d'un truc qui sort du quotidien. C'est ça ?

Phooka a dit…

J'aime beaucoup ta réponse Nicolas. Moi non plus je ne regarde pas quand il y a un accident sur la route, au contraire je détourne le regard. Je ne supporte pas la souffrance d'autrui. Et de la même façon je ne peux pas lire ces thrillers ou alors je sauterais les passages de la même façon que je détourne le regard d'un accident. Je ne me vante pas de ne pas être voyeur, mais juste que je ne supporte pas ce type de violence alors que ça ne me gène pas, bien au contraire lorsqu'il s'agit de fantastique (Clive Barker ou Sir Cédric) parce que justement ce n'est pas réel.

Maintenant pourquoi ça plait..ben on n'est pas tous pareil. C'est comme les jeux viéos où il faut dézinguer tout le monde je suppose.

Mais je reste persuadée qu'on peut faire un succès en thriller sans ce côté hyper violent et glauque.

Dup a dit…

Là, je rejoins Phooka sur sa conclusion !

Je suis pareil vis-à-vis d'un accident ( donc le voyeurisme en quelque sorte ), dans la vraie vie.

En revanche quand je plonge dans un livre, une histoire, qu'elle soit teintée fantastique ou pas, je suis dans un autre monde et franchement, quelque soit les horreurs amenées cela ne me dérange pas! Attention, il faut que celles-ci arrivent logiquement et/où servent l'intrigue hein !

Ptitetrolle a dit…

Très intéressant ce débat! Je ne suis pas une pro des thrillers, même si j'ai lu quasiment tous les auteurs de "gore/sadique/sanglant" cités plus hauts, entre autres Maxime Chattam, Franck Thilliez, Le Chuchoteur ou Sire Cédric.
Comme les autres, je pense que ce n'est pas le gore qui fait un bon thriller. L'intrigue, le suspens, garder le lecteur en haleine, le surprendre, c'est ça qui fait une bonne histoire. Du gore pour du gore, ça ne vaut rien.
Mais en même temps, entre un bon thriller (avec super intrigue, suspens et tout le tintouin) qui reste gentillet et un autre bon thriller avec un peu d'hémoglobine, ben moi je vote pour le gore.
C'est juste que ça rajoute de l'émotion, du "spectacle". Quand je lis un passage gore, je ne suis pas dégoutée (ou rarement) parce que je sais que ce n'est qu'une fiction, et j'ai plutôt un coup d'adrénaline, ça rend le suspens encore plus intense.
Et bizarrement, dans la vraie vite je suis une vraie chochotte là dessus ! Je déteste le sang et rien que d'en parler j'ai limite envie de m'évanouir. Voir sous mes yeux une scène de violence réelle me mets hyper mal à l'aise, et si je voyais un accident de la route (je touche du bois, ça ne m'est encore jamais arrivé), c'est clair que je détournerai les yeux sous peine de me sentir très mal...
Du coup je me demande si mon "amour" du gore dans les thriller n'est pas lié à ça : dans la vraie vie, je ne peux pas me permettre de voir une goutte de sang sans tomber dans les pommes, et j'éprouve une énorme incompréhension face aux violences gratuites.
Alors peut-être qu'un peu à la façon de Maxime Chattam, je recherche dans le thriller "gore" à comprendre ce qu'est "le Mal", cette part sombre de l'homme qui reste un grand mystère !

Anonyme a dit…

Houla ! on se fait une fausse idée de moi !!!!! je me suis sûrement mal exprimée !!!!
Je suis hyper fan de ce genre de littérature mais ce n'est pas pour cela que je regarde les cartons au bord des routes, j'ai vu assez d'horreurs dans mon ancien job...
Je ne fais qu'un constat "général", une très grande majorité regardera ce qu'elle a sous les yeux !

La violence au quotidien, la mort, sont tellement banalisées par les médias que cela finit peut-être par nous décaler de la réalité ?
Il n'y a qu'à regarder les infos ou ouvrir le journal pour que toutes les horreurs du monde vous sautent à la gorge !
Alors est-ce parce que nous sommes trop ou passez impressionnables que nous recherchons des sensations fortes dans les détails de ces livres glauques ?
Est-ce que cela nous "sert" à extérioser" des angoisses inconscientes ?

J'aime lire ces livres, cela me met souvent mal à l'aise mais c'est comme ça, je suis bon public pour le gore pourvu que l'enquête soit bien menée et le suspens au rdv ! `Car juste du gore "gratuit", sans histoire/genèse/recherche autour, non !
J'aime comprendre pourquoi un serial killer devient serial killer... Et le détail de ce qu'ils sont capables de faire subir fait partie "du tableau clinique" de l'individu... je trouve le tout fascinant...
Les êtres humains sont si surprenants !

Je pense également qu'il n'y a pas forcément besoin d'hémoglobine et de tortures sanguinolentes pour faire un très bon thriller... On peut aussi faire frémir en laissant sous entendre les faits... (Je repense au livre de Jean-Marc Souvira, LE MAGICIEN)
Et cela peut être tout aussi insoutenable que si c'était détaillé...

Les auteurs écrivent (gore ou non) pour passer un message, une idée, une impression, une peur, une conviction, un avertissement, de la poésie, du rêve, du divertissement...
Ce n'est pas aussi évident que dans les mythes et légendes, j'en conviens mais je suis persuadée que tout à un sens quelque soit la littérature choisie !

niki a dit…

moi qui suis une inconditionnelle des "cozy mysteries", je suis convaincue qu'un bon thriller n'a pas besoin de gore, glauque, torture etc - mais il paraît que je suis vieux jeu dans mes lectures ;)

Dup a dit…

En fait je me retrouve dans ce que dit Wal, car j'aime stresser, j'aime avoir peur, et c'est pour ça que j'aime les thrillers. Et je crois qu'en matière de thrillers nous avons les mêmes goûts toutes les deux.
Contrairement à Niki, les Agatha Cristhie, les Sherlock Holmes par exemple, ne me passionnent pas du tout...
Bon, heureusement, il en faut pour tous les goûts !!!

Et je vais reprendre l'exemple de Wal car je pense qu'il va étayer ma thèse.
Le magicien de Jean-Marc Souvira ( je ne connais pas les chiffres de vente, mais il me semble qu'il a fait un carton ) ne contient aucune scène gore, glauque. C'est juste sous-entendu, et c'est bien assez car là encore il s'agit d'enfants : c'est un pédophile qui est traqué. C'est un livre que j'ai néanmoins beaucoup aimé. Alors suis-je insensible, perverse ?
Je ne crois pas, je suis mère donc quelque part, logiquement plus sensible à tout ce qui touche aux gamins. Et bien dans un livre comme celui ci, je fais corps et âme avec le commissaire qui traque l'affreux pas beau du tout ! Et quand en plus le personnage du flic créé par l'auteur est un personnage avec qui on entre facilement en empathie, ben c'est gagné !

Et ça fait un thriller ni sordide, ni gore, ni glauque et qui a eu du succès !

SBM a dit…

Merci pour cet échange très intéressant. Perso, je trouve que les auteurs français de polars donnent dans la surenchère gore, je n'aime pas (il y a aussi Karyl Ferey, très violent). Le pitch du roman de Carrisi me fait retarder cette lecture, même si on me dit que c'est très bien, les enfants torturés, très peu pour moi. Par contre, il n'y a pas de descriptions morbides ou violentes dans "Les visages", un grand livre sur l'Amérique.

Les lectures de Licorne a dit…

Après ce débat passionnant, je vais sûrement répéter certaines idées, mais pour moi également il n'est absolument pas besoin d'hémoglobine à profusion pour faire un bon thriller, c'est l'atmosphère qui dégage tout et l'écriture stylée qui permet de faire monter le suspens, les détails sanguinolents ou glauques sont bien souvent des artifices qui nous permettent de visualiser et d'accentuer la terreur d'une action. Cela nous met plus vite en situation. J'ai été très mal à l'aise avec les livres de Mo Hayder "pig island" par exemple... et certains brusssolo ou chattam. Mais la plupart du temps comme on est transporté par le bon sujet de l'intrigue, il n'est pas monstrueux d'adhérer à quelques "glauquosités". Pour résumer, ce n'est pas ma tasse de thé, (et de moins en moins en vieillissant), mais si l'histoire le suggére, pourquoi pas ?

Dup a dit…

Pour répondre à cette nouvelle question, moi je dis : "Honnêtement, je ne sais pas !"
J'essaye de m'imaginer avec un nouveau Chattam ou un nouveau Thilliez dans les mains et une 4ème de couv parlant d'une "série de victimes", et ça le fait pas ! :))
Cependant pour ma défense, je dirai que je ne cherche pas que ça, "des cadavres atrocement mutilés", et la meilleure preuve est quand même que j'ai répondu ok à l'attachée de presse de chez Michel Lafon qui m'a proposé en SP un certain Premier crâne d'un illustre inconnu, dont la 4ème de couv est plus que soft ;)

Michaël Moslonka a dit…

Bonjour à toutes et tous,
(Hello Dup! :) )

Je prends le train en marche en espérant ne pas la rater cette marche et ne pas, du coup, me faire broyer os par os dans une grande gerbe de sang et de cervelle écrabouillée.

Pour répondre à la question, j'éviterai l'intitulé "une série de cadavres atrocement mutilés". Je ne supporte pas le gore :)

Et pourtant en tant qu'auteur, je suis capable d'en écrire, voire même d'en rajouter et surajouter alors que j'ai plutôt tendance à croire en ce fameux rideau de douche hitchcockien où l'on n'aperçoit que les ombres du couteau, de la victime, du meurtrier et au final de la tuerie.

Pourquoi en rajouter alors? Parce que, peut-être sommes-nous enfermé dans notre délire et qu'un auteur a, par définition, tendance à en rajouter. Sur tout (pas uniquement le gore). Alors qu'il suffit de faire un parallèle entre la hache plantée dans l'os de la jambe et un bûcheron enlevant sa lame d'un morceau de bois (Misery de Monsieur King) pour que l'effet soit saisissant et horrifiant (et que cette image vous poursuive ad vitam eternam).

Maintenant, je crois que l'époque est à la surenchère et au voyeurisme. l'on vent tout voir: plus un seul centimètre carré de peau ne doit être caché, et ce qu'il y a en dessous se doit d'être aussi dévoilé hé hé

Des éditeurs l'ont bien compris. Et, parfois, si vous trouvez que l'auteur en fait trop, ou que cette fois il y a trop de gore, la raison est que l'éditeur a demandé à l'auteur d'en faire trop. sans remettre en cause le talent et le travail d'écriture de l'auteur, il faut garder à l'esprit, à mon avis, qu'un livre peut se révéler un objet préfabriqué. Ou du moins avec un cahier des charges.

Pour l'anecdote: j'ai écris un roman sentimental sur commande (ou "commis un roman sentimental", mais j'assume ;) ) Après relecture, le comité de lectrices m'a demandé plus de scènes de... sexe. "ça manque de sexe" m'a-t-on dit moi qui n'avait voulu que suggérer certains, dirai-je, contacts.

Pour finir, je relèverai que le gore n'est pas le seul ingrédient dont on peut abuser dans une bonne recette de livre. Il y aussi le sexe. Voire le scato (si si, lisez "Le Vide" de Patrcik Senécal, si vous ne me croyez pas ;)
J'ai aussi tendance à penser qu'il arrive que l'auteur ne fait pas exprès - peut-être parce qu'il est un psychopathe qui s'ignore? (comme se demandent parfois, ou confirment après lecture, certaines lectrices & lecteurs).

Michaël Moslonka